L’article en vietnamien:
Email:
josleminhthong@gmail.com
Le 19 Juillet 2014.
Contenu
I. Introduction
II. Le témoignage de Jésus en 3,11.32-33
1. “Le témoignage” et
“témoigner” en 3,11
2. “Le témoignage” et
“témoigner” en 3,32-33
III. Le témoignage de Jésus et du Père aux ch. 5
et ch. 8
1. Le texte de 5,30-40
et 8,13-19
a) Jn 5,30-40
b) Jn 8,13-19
c) La comparaison entre 5,30-40 et 8,13-19
2. Le témoignage de Jésus n’est pas valable (5,31)
ou valable (8,14a)?
a) L’origine de l’expression: “le témoignage
de soi-même n’est pas valable”
b) Jn 5,31 et 8,14 dans
le contexte de 5,30-40 et 8,13-19
3. Le témoignage du Père
(5,31-32.37-38)
4. Le témoignage de deux
personnes (8,17-18)
5. Le contenu du témoignage
de Jésus
6. Les opposants n’acceptent
pas le témoignage
IV. Conclusion
I. Introduction
L’article “‘Le
témoignage’ (marturia) et ‘témoigner’ (martureô) dans l’Évangile de Jean” a
présenté de manière générale ce thème et les occurrences du nom “marturia” et du
verbe “martureô”. Pour une approche plus détaillée dans les autres articles,
nous avons présenté le
témoigage de Jean Baptiste et celui
du disciple que Jésus aimait. Dans cet article nous analysons le témoignage
de Jésus et du Père. Ce thème apparaît dans
l’Évangile de Jean comme suit:
Le témoignage de Jésus est présenté par le nom “marturia”
(témoignage) apparu 6 fois en 3,11.32.33; 5,31; 8,13.14 et par le verbe
“martureô” (témoigner) apparu 10 fois en 3,11.32; 4,44; 5,31; 7,7; 8,13.14.18a;
13,21; 18,37. Ce témoignage figure dans les chapitres suivants:
- Ch. 3 (5 fois): 3,11.32.33 (le nom: marturia), 3,11.32 (le verbe:
martureô).
- Ch. 4 (1 fois): 4,44 (le verbe).
- Ch. 5 (2 fois): 5,31a (le verbe); 5,31b (le nom).
- Ch. 7 (1 fois): 7,7 (le verbe).
- Ch. 8 (5 fois): 8,13.14 (le nom); 8,13.14.18a (le
verbe).
- Ch. 13 (1 fois): 13,21 (le verbe).
- Ch. 18 (1 fois): 18,37 (le verbe).
Ainsi, le “témoignage” et “témoigner” de Jésus sont
apparus principalement dans le Livre des Signes (Jn 1–12): 14 fois. Tandis que
dans le Livre de la Gloire (Jn 13–21), il y a seulement 2 fois le verbe “martureô” en 13,21;
18,37.
Le témoignage du Père est présenté par le nom “marturia”
(témoignage) apparu 2 fois en 5,34; 8,17 et par le verbe “martureô” (témoigner)
apparu 4 fois en 5,32a.32b.37; 8,18b. Ce thème ne figure que dans deux
chapitres:
- Ch. 5 (4 fois): 5,34 (le nom); 5,32a.32b.37 (le
verbe).
- Ch. 8 (2 fois): 8,17 (le nom); 8,18b (le verbe).
En s’appuyant sur ces occurrences du thème
“témoignage” dans l’Évangile, cet article aborde deux grandes parties: (I) Le
témoignage de Jésus en Jn 3, et (II) Le témoignage de Jésus et du Père dans les
chapitres 5 et 8. Dans les chapitres 4; 7; 13; 18, le témoignage de Jésus ne comporte qu’une occurrence du verbe “martureô” en 4,44; 7,7; 13,21; 18,37. Ces versets seront
examinés dans un autre article.
II. Le témoignage de Jésus en 3,11.32-33
En Jn 3, le témoignage de Jésus est présenté par
Jésus lui-même, il parle à Nicodème de son témoignage en 3,11. Tandis qu’en 3,32-33,
c’est Jean Baptiste qui parle du témoignage de Jésus. Les citations bibliques
ci-dessous sont prises dans la Bible de
Jérusalem, 2000.
1. “Le témoignage” et
“témoigner” en 3,11
Jésus révèle à Nicodème en 3,3: “En
vérité, en vérité, je te le dis, à moins de naître de nouveau, nul ne peut voir
le Royaume de Dieu.” Nicodème a mal interprété l’idée de “naître
de nouveau” (3,4). Jésus lui a expliqué en 3,5-7 mais Nicodème
ne
saisit pas la signification quand il dit à Jésus en
3,9: “Comment cela peut-il se faire?” Cette fois, Jésus répond
à Nicodème par deux autres questions en 3,10.12. Entre ces deux questions,
Jésus parle de son témoignage en utilisant étrangement le pronom personnel de
la première personne du pluriel: “nous” (3,11). Le narrateur relate en 3,10-12:
“10 Jésus lui (Nicodème) répondit: ‘Tu
es Maître en Israël, et ces choses-là, tu ne les saisis pas? 11 En vérité,
en vérité, je te le dis, nous parlons de ce que nous savons et nous attestons
ce que nous avons vu; mais vous n’accueillez pas notre témoignage. 12 Si vous
ne croyez pas quand je vous dis les choses de la terre, comment croirez-vous
quand je vous dirai les choses du ciel?’” À partir du verset 3,10, le personnage Nicodème n’apparaît plus dans le texte, le passage suivant
(3,13-21) est le monologue de Jésus sur sa mission avec trois idées
principales: (1) L’origine de Jésus (3,13-14),
(2) La manifestation de l’amour de Dieu pour le monde (3,16-17) et (3) Le jugement
pour ceux qui ne croient pas en Jésus (3,18-21).
Le fait que Jésus utilise le pronom personnel de
la première personne du pluriel “nous” en 3,11 peut être interprété comme suit:
le témoignage de Jésus et son action de témoigner sont identifiés à ceux de la communauté des disciples. Autrement dit, Jésus se
met du côté de la communauté croyante. En utilisant le pronom “nous”, Jésus
parle à la place de cette communauté. Quant à Nicodème, il est considéré comme un
représentant des autorités juives, Jésus utilise donc le pronom personnel de la
deuxième personne du pluriel: “vous”
pour lui parler en 3,11.
La première idée de 3,11 fait allusion à la
prédication de Jésus et ses disciples, Jésus dit en 3,11b: “Nous parlons
de ce que nous savons.” L’idée suivante (3,11c) est
l’action de témoigner de Jésus et celle de la communauté basée sur ce qu’ils ont
vu comme Jésus le dit en 3,11c: “Nous attestons (marturoumen) ce que
nous avons vu”, la traduction littérale est: “Nous témoignons (marturoumen)
de ce que nous avons vu.” À la fin de 3,11 (3,11d), Jésus parle du refus de ce témoignage de la
part des Juifs dont Nicodème est leur représentant, Jésus dit en 3,11d: “mais
vous n’accueillez pas notre témoignage.” Ce refus est présenté
tout au long de l’Évangile de Jean à travers les conflits et les controverses
entre Jésus, d’une part, les Pharisiens,
les Juifs et les grands prêtres, d’autre part.
2. “Le témoignage” et
“témoigner” en 3,32-33
Le thème du témoignage de Jésus en 3,32-33 fait partie du monologue de Jean Baptiste
en 3,31-36 adressé à ses disciples. (Voir analyse au point “3. Jean témoigne de
Jésus en 3,31-36” dans l’article: “‘Le
témoignage’ et ‘témoigner’ de Jean Baptiste dans l’Évangile de Jean.” Jean Baptiste
commence son témoignage en 3,31-33: “31 Celui qui vient d’en haut
est au-dessus de tous; celui qui est de la terre est terrestre et parle en
terrestre. Celui qui vient du ciel 32 témoigne de ce qu’il a vu et entendu, et
son témoignage, nul ne l’accueille. 33 Qui accueille son témoignage certifie
que Dieu est véridique.”
En 3,32, Jean Baptiste parle du témoignage de
Jésus en tant que “Celui qui vient d’en haut” (3,31a) et “Celui qui vient du ciel” (3,31c). Le témoignage de celui-ci est basé sur ce qu’il a vu et
entendu. Jean dit en 3,31c-32a: “31c Celui qui vient du ciel 32a témoigne
de ce qu’il a vu et entendu.” C’est ce que Jésus a
vu et entendu auprès de son Père comme il le dit aux Juifs en 8,26: “J’ai sur vous
beaucoup à dire et à juger; mais celui qui m’a envoyé est véridique et je dis
au monde ce que j’ai entendu de lui.” À la fin de son ministère publique, Jésus
résume ainsi sa mission en 12,49-50: “49 Car ce n’est pas de moi-même que j’ai
parlé, mais le Père qui m’a envoyé m’a lui-même commandé que dire et de quoi
parler; 50 et je sais que son commandement est vie éternelle. Ainsi donc ce dont
je parle, tel que le Père me l’a dit j’en parle.” Avant d’entrer dans sa
passion, Jésus redit cette idée à ses disciples en 14,24: “Celui qui ne m’aime
pas ne garde pas mes paroles; et la parole que vous entendez n’est pas de moi,
mais du Père qui m’a envoyé.” Ainsi tout ce que Jésus révèle et témoigne
provient de ce qu’il a vu et entendu auprès de son Père.
La deuxième partie du verset 3,32 est 3,32b qui
parle du refus du témoignage, lequel est parallèle avec 3,11c. Jean Baptiste
déclare en 3,32b: “Son témoignage (de Jésus), nul ne l’accueille.” Cependant, le verset suivant (3,33) va dans le sens positif: “Qui
accueille son témoignage certifie que Dieu est véridique” (3,33). Le style littéraire de contraste entre “accueillir” ou
“refuser”, “croire” ou “ne pas croire”, “se perdre” ou “être sauvé”, “être jugé”
ou “ne pas être jugé” est l’une des particularités de l’Évangile de Jean. Ces
couples d’opposition existent dans le témoignage de Jésus en 3,13-21 et celui
de Jean Baptiste en 3,31-36. Par exemple Jésus dit en 3,18: “Qui croit
en lui n’est pas jugé; qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru
au Nom du Fils Unique-Engendré de Dieu.” Quant à Jean Baptiste,
il termine ainsi son témoignage en 3,36: “Qui croit au Fils a la vie
éternelle; qui résiste au Fils ne verra pas la vie; mais la colère de Dieu
demeure sur lui.”
III. Le témoignage de Jésus et du Père aux ch. 5 et ch. 8
Le thème du “témoignage” et de “témoigner” de
Jésus et du Père est rapporté en deux péricopes: 5,30-40 et 8,13-19. Les thèmes
communs de ces deux péricopes sont “juger” (krinô), “témoigner” (martureô) et
“le témoignage” (marturia). Cette partie présente 6 points: (1) Le texte de 5,30-40
et de 8,13-19, (2) Le témoignage de Jésus n’est pas valable (5,31) ou valable (8,14a)?
(3) Le témoignage du Père (5,31-32.37-38), (4) Le témoignage de deux personnes
(8,17-18), (5) Le contenu du témoignage de Jésus, (6) Les opposants n’acceptent
pas le témoignage.
1. Le texte de 5,30-40 et
8,13-19
Nous présentons ci-dessous le texte et la
structure de deux péricopes: 5,30-40 et 8,13-19.
a) Jn
5,30-40
La péricope 5,30-40 fait partie du monologue de Jésus adressé aux Juifs (5,19-47). Cette péricope se structure
en 6 unités:
(1) 5,30: Le jugement de Jésus est juste.
“30 Je (Jésus) ne puis rien faire de moi-même. Je
juge selon ce que j’entends: et mon jugement est juste, parce que je ne cherche
pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé.”
(2) 5,31-32: Le Père témoigne de Jésus (// 5,37-38).
“31 Si je me rends témoignage à moi-même, mon
témoignage n’est pas valable. 32 Un autre témoigne de moi, et je sais qu’il est
valable le témoignage qu’il me rend.”
(3) 5,33-35: Jean
Baptiste rend témoignage à la vérité.
“33 Vous (les Juifs) avez envoyé trouver Jean et
il a rendu témoignage à la vérité. 34 Quant à moi, ce n’est pas d’un homme que
je reçois le témoignage; mais je dis cela pour que vous, vous soyez sauvés. 35
Celui-là était la lampe qui brûle et qui luit, et vous avez voulu vous réjouir
une heure à sa lumière.”
(4) 5,36: Les œuvres de
Jésus témoignent à son sujet.
“36 Mais j’ai plus grand que le témoignage de
Jean: en effet, les œuvres que le Père m’a donné à mener à bonne fin, les
œuvres mêmes que je fais, témoignent à mon sujet que le Père m’envoie.”
(5) 5,37-38: Le Père témoigne de Jésus (// 5,32).
“37 Et le Père qui m’a envoyé, lui, m’a rendu
témoignage. Vous n’avez jamais entendu sa voix, vous n’avez jamais vu sa face,
38 et sa parole, vous ne l’avez pas à demeure en vous, puisque vous ne croyez
pas celui qu’il a envoyé.”
(6) 5,39-40: Les Écritures
témoignent de Jésus.
“39 Vous scrutez les Écritures, parce que vous
pensez avoir en elles la vie éternelle, et ce sont elles qui me rendent
témoignage, 40 et vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie!”
b) Jn
8,13-19
La péricope 8,13-19 appartient au débat entre Jésus
et les Pharisiens en 8,12-30, cette péricope est structurée en 4 unités:
(1) 8,13-14: Le témoignage de Jésus est valable.
“13 Les Pharisiens lui (Jésus) dirent alors: ‘Tu
te rends témoignage à toi-même; ton témoignage n’est pas valable.’ 14 Jésus
leur répondit: ‘Bien que je me rende témoignage à moi-même, mon témoignage est
valable, parce que je sais d’où je suis venu et où je vais; mais vous, vous ne
savez pas d’où je viens ni où je vais.’”
(2) 8,15-16: Le jugement de Jésus est vrai.
“15 Vous (les Pharisiens), vous jugez selon la
chair; moi, je ne juge personne; 16 et s’il m’arrive de juger, moi, mon
jugement est selon la vérité, parce que je ne suis pas seul; mais il y a moi et
celui qui m’a envoyé.”
(3) 8,17-18: Le témoignage de deux personnes.
“17 Et il est écrit dans votre Loi que le
témoignage de deux personnes est valable. 18 Moi, Je suis mon propre témoin.
Témoigne aussi à mon sujet le Père qui m’a envoyé.”
(4) 8,19: Les pharisiens ne connaissent pas Jésus et le Père.
“19 Ils (les Pharisiens) lui disaient donc: ‘Où
est ton Père?’ Jésus répondit: ‘Vous ne connaissez ni moi ni mon Père; si vous
me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père.’”
c) La
comparaison entre 5,30-40 et 8,13-19
La ressemblance et la différence entre les deux
péricopes 5,30-40 et 8,13-19 sont
présentées dans le tableau suivant:
Le passage 5,30-40 ne souligne pas le témoignage
de Jésus (5,31) mais souligne les témoignages des autres en sa faveur. Ce sont
les témoignages du Père (5,32.37-38), de Jean Baptiste (5,33-35), des œuvres que Jésus fait (5,36), et des Écritures (5,39).
Tandis que le passage 8,13-19 met en relief le témoignage de deux personnes: Jésus
et son Père. Le tableau ci-dessus présente les ressemblances et les différences
entre deux passages 5,30-40 et 8,13-19, lesquelles peuvent être classées en
trois groupes:
(I) Trois thèmes communs entre
5,30-40 et 8,13-19.
1) Le jugement de Jésus est juste et vrai (5,30
// 8,15-16). Selon le contexte, le nom “krisis” et le verbe “krinô” en
grec peuvent avoir le sens de “jugement”, “juger” ou de “condamnation”,
“condamner”. Ici (5,30 // 8,15-16) Jésus parle de son jugement et le jugement
des Pharisiens, ces derniers jugent “selon la chair” (8,15a).
2) Le témoignage du Père (5,31-32.37-38 // 8,17-18).
3) Les opposants (les Juifs et les Pharisiens) ne
connaissent pas plusieurs faits concernant Jésus et son Père (5,37b.38.40; 8.14c.19).
(Voir l’analyse ci-dessous au point “6. Les opposants n’acceptent pas le
témoignage”).
(II) Six détails sont propres au passage 5,30-40:
1) Jésus ne rend pas témoignage à lui-même (5,31).
2) Le rappel du témoignage de Jean Baptiste (5,33-35).
3) Les œuvres de Jésus témoignent de lui (5,36).
4) Les Écritures témoignent de Jésus (5,39).
5) Les Juifs n’ont jamais entendu la voix du
Père, ni vu sa face (5,37b).
6) Les Juifs n’ont pas en eux la parole du Père
puisqu’ils ne croient pas celui que le Père a envoyé (5,38).
(III) Six détails sont propres au passage 8,13-19:
1) Jésus rend témoignage à lui-même et son témoignage est valable (8,13-14a).
2) Jésus sait d’où il est venu et où il va (8,14b).
3) Le témoignage de deux personnes (Jésus et son Père) correspond à la
loi (8,17-18).
4) Les pharisiens ne savent pas d’où Jésus vient ni où il va (8,14c).
5) Les pharisiens ne savent pas où est le Père (8,19a).
6) Les pharisiens ne connaissent ni Jésus ni le Père (8,19b).
Dans les deux passages 5,30-40 et 8,13-19, il
existe deux paroles de Jésus (5,31; 8,14a) qui semblent contradictoires.
Une question se pose: Le témoignage de Jésus n’est
pas valable (5,31) ou valable (8,14a)?
2. Le témoignage de Jésus n’est pas valable (5,31) ou valable (8,14a)?
Dans la péricope 5,30-40, Jésus dit aux Juifs en
5,31-32: “31 Si je me rends témoignage à moi-même, mon témoignage n’est
pas valable. 32 Un autre témoigne de moi, et je sais qu’il est valable le
témoignage qu’il me rend.” Puis Jésus parle d’une serie
de témoignages à son sujet en 5,32-40. Dans la péricope 8,13-19, les Pharisiens
utilisent la parole de Jésus en 5,31 pour le questionner en 8,13: “Tu (Jésus)
te rends témoignage à toi-même; ton témoignage n’est pas valable.” Cette fois, Jésus répond aux Pharisiens en 8,14: “Bien
que je me rende témoignage à moi-même, mon témoignage est valable, parce que je
sais d’où je suis venu et où je vais; mais vous, vous ne savez pas d’où je
viens ni où je vais.”
Ce que Jésus dit en 5,31 et 8,14a soulève une
question: Le témoignage de Jésus n’est pas valable (5,31) ou valable (8,14a)? En
5,31, Jésus dit aux Juifs: “Si je me rends témoignage à moi-même, mon
témoignage n’est pas valable.” Tandis qu’en 8,14a, Jésus dit aux Pharisiens: “Bien
que je me rende témoignage à moi-même, mon témoignage est valable.” Comment peut-on
expliquer ces paroles qui sont apparemment contradictoires? Pour répondre à cette question, nous étudions
deux sujets: (a) L’origine de l’expression: “Le témoignage de
soi-même n’est pas valable” et (b) Jn 5,31 et 8,14a dans
le contexte de 5,30-40 et 8,13-19.
a) L’origine de l’expression: “Le témoignage de soi-même n’est pas valable”
Ce que Jésus dit en 5,31: “Si je me rends
témoignage à moi-même, mon témoignage n’est pas valable” renvoie à un article de la loi dans l’Ancien Testament (Dt 17,6; 19,15;
Nb 35,30. Selon le livre du Deutéronome (Dt 17,2-7), quiconque transgresse
l’alliance avec Yahvé et serve d’autres dieux sera lapidé. La procédure du
jugement dans ce cas est indiqué en Dt 17,6: “On ne pourra être
condamné à mort qu’au dire de deux ou trois témoins, on ne sera pas mis à mort
au dire d’un seul témoin.” Le
Deutéronome fixe ainsi la comparution des témoins devant le tribunal en Dt
19,15: “Un seul témoin ne peut suffire pour convaincre un
homme de quelque faute ou délit que ce soit; quel que soit le délit, c’est au
dire de deux ou trois témoins que la cause sera établie.” Si “c’est un témoin
mensonger, qui a accusé son frère en mentant” (Dt 19,18b), celui-ci sera traité
“comme il méditait de traiter son frère”
(Dt 19,19a). Le livre des Nombres rapporte l’instruction
sur le témoin en Nb 35,30: “En
toute affaire d’homicide, c’est sur la déposition de témoins que le meurtrier
sera mis à mort; mais un témoin unique ne pourra porter une accusation
capitale.” Ainsi selon l’Ancien Testament, le témoignage
d’un seul témoin n’est pas valable. Cependant les citations ci-dessus parlent
du témoignage au sujet des autres, il ne s’agit pas de rendre témoignage à
soi-même comme Jésus l’a dit en Jn 5,31 et 8,13-14.
Il est possible que la parole de Jésus sur “le
témoignage de lui-même” en Jn 5,31, laquelle est reprise par les Pharisiens en
8,13, renvoie à la littérature juive. Par exemple Mishnah Ketubot, chapitre 2, verset
9 écrit: “Personne ne peut témoigner de lui-même (No one may testify
regarding himself).” (Voir http://www.emishnah.com/sedarim.html).
Dans le Talmud de Babylone, tract Rosh Hashana (HaSahanah), chapitre 3, verset 1 écrit:
“Un individu n’est pas autorisé par lui-même (An individual is not authorized by himself).” (Voir http://halakhah.com/). En
tout cas si nous mettons cette parole de Jésus (5,31; 8,14a) dans son contexte
littéraire, nous pouvons comprendre son sens.
b) Jn 5,31 et 8,14 dans le contexte de 5,30-40 et 8,13-19
En 5,31, la parole de Jésus: “si je me
rends témoignage à moi-même, mon témoignage n’est pas valable” est placée dans le contexte de la pensée de l’époque relative au témoin,
laquelle est inscrite dans l’Ancien Testament et dans la littérature juive. Pour
se conformer à l’exigence de la loi, Jésus parle d’une serie de témoignages à son
sujet: Le témoignage du Père (5,32.37-38), celui de Jean Baptiste (5,33-35), celui
des œuvres de Jésus (5,36) et celui des Écritures (5,39).
En revanche, en 8,13, les Pharisiens interrogent Jésus
en reprenant la même phrase que Jésus a dit aux Juifs en 5,31. Ils lui disent:
“Tu te rends témoignage à toi-même; ton témoignage n’est pas valable” (8,13). Ici la réponse de Jésus est
l’inverse de celle de 5,31. Il dit aux Pharisiens en 8,14: “Bien que je
me rende témoignage à moi-même, mon témoignage est valable, parce que je sais d’où
je suis venu et où je vais; mais vous, vous ne savez pas d’où je viens ni où je
vais.” La raison pour laquelle le témoignage de Jésus est
valable est que Jésus sait d’où il est venu et où il va (8,14b), tandis
que les Pharisiens, ils ne savent pas d’où Jésus vient ni où il va (8,14c), c’est
pourquoi ils jugent selon la chair (8,15a). Dans cette perspective Jésus est le
seul qui peut témoigner de lui-même et son témoignage est valable,
car son origine est d’en haut, il est celui qui est descendu du ciel et il va y
monter comme il le dit en 3,13: “Nul n’est monté au ciel, hormis celui
qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme.”
En résumé, lorsque Jésus dit: “Si je me
rends témoignage à moi-même, mon témoignage n’est pas valable” (5,31), il parle de situation générale où la loi sur le témoin est
appliqué à tout le monde. Quand Jésus dit: “Bien que je me rende
témoignage à moi-même, mon témoignage est valable” (8,14a), il en parle avec un statut particulier qui s’applique à lui seul. Jésus est l’envoyé du Père pour révéler
à l’homme le dessein du Père, son témoignage de lui-même est donc valable. En d’autres
termes, quand Jésus parle des témoignages en 5,30-39, il en parle en tant qu’homme, quand
il parle du témoignage de lui-même et celui de son Père, il en parle en tant
que “Fils Unique-Engendré, qui est dans le sein du Père” (1,18b). D’après ce statut particulier Jésus
parle du témoignage de deux personnes en 8,17-18: Le témoignage de Jésus et de
son Père. Avant d’analyser ce sujet, nous examinons le témoignage du Père en 5,31-32.37-38.
3. Le témoignage du Père
(5,31-32.37-38)
En 5,30-40, Jésus ne rend pas témoignage à
lui-même mais il parle des autres témoignages dont celui du Père est important. Jésus dit aux Juifs en 5,31-32: “31 Si je me rends témoignage à
moi-même, mon témoignage n’est pas valable. 32 Un autre témoigne de moi, et je
sais qu’il est valable le témoignage qu’il me rend.” “Un autre” en 5,32a sera précisé
en 5,37a comme Jésus le dit: “Et le Père qui m’a envoyé, lui, m’a rendu témoignage”
(5,37a). En 5,32b, Jésus affirme que le témoignage de son Père est valable: “Je sais qu’il est valable
le témoignage qu’il me rend.” Ainsi la péricope 5,30-40
souligne l’importance du témoignage du Père, tandis que la péricope 8,13-19 met
en relief le témoignage de deux personnes.
4. Le témoignage de deux
personnes (8,17-18)
L’unité 8,17-18 développe le thème du témoignage
de deux personnes selon l’exigence des textes vétérotestamentaires cités
ci-dessus (Dt 17,6; 19,15; Nb 35,30). Tout d’abord Jésus explique pourquoi son témoignage
à lui-même est valable (voir le point 2. plus haut). Ensuite Jésus s’appuie sur
la loi pour dire aux Pharisiens en 8,17-18:
“17 Et il est écrit dans votre Loi que le témoignage de deux personnes
est valable. 18 Moi, Je suis mon propre témoin. Témoigne aussi à mon sujet le
Père qui m’a envoyé.” Les textes du Dt 17,6; 19,15; Nb 35,30
disent que le témoignage de deux personnes est valable. Notons que le
témoignage de Jésus et celui du Père ne sont pas les témoignages de deux
personnes humaines mais ce sont le témoignage de Dieu le Père et celui du Fils
de Dieu. Par conséquent, la véridicité et la fiabilité sont absolues. Les
hommes peuvent faire des faux témoignages, tandis que le témoignage de Dieu et
de son Envoyé (Jésus) est toujours conforme à la vérité.
5. Le contenu du témoignage de
Jésus
Les deux péricopes 5,30-40 et 8,13-19 se concentrent
sur l’authenticité du témoignage, ces péricopes n’indiquent pas le contenu du témoignage mais le statut du témoignage: le
témoignage de Jésus est valable (8,14a), le témoignage du Père est valable (5,32b).
Quant à Jean Baptiste, il rend témoignage à la vérité (5,33b). Jésus révèle aussi le témoignage de ses œuvres (5,36) et le témoignage
des Écritures (5,39). Tous ces personnages ainsi que les œuvres et les Écritures rendent témoignage à Jésus.
Cependant le contenu du témoignage est révélateur
dans l’expression “les œuvres de Jésus” en 5,36c. Jésus détermine l’origine des
œuvres qui lui rendent témoignage en 5,36b: “Les œuvres que le Père m’a
donné à mener à bonne fin.” Ce ne sont donc pas les
œuvres propres à Jésus mais ce sont les œuvres du Père. C’est le Père qui a
confié à Jésus ses œuvres, et dans sa mission publique Jésus fait les œuvres de
son Père. Les œuvres du Père que Jésus réalise dans le monde témoignent que
Jésus est l’envoyé du Père comme Jésus le dit en 5,36c: “Les œuvres mêmes
que je fais, témoignent à mon sujet que le Père m’envoie.”
En résumé, dans le contexte immédiat de 5,36, le
contenu du témoignage de Jésus peut être récapitulé en deux points: (1) Dieu
est le Père de Jésus, (2) Le Père a envoyé Jésus dans le monde pour mener à
bonne fin les œuvres du Père. Dans le contexte large de l’ensemble de
l’Évangile de Jean, le contenu du témoignage de Jésus renferme tout ce que cet
Évangile révèle sur l’identité de Jésus, son origine et sa mission.
C’est-à-dire que tout ce que Jésus a dit et a fait dans sa vie, ainsi que tout
ce que l’évangéliste parle de Jésus dans l’Évangile, sont des témoignages
authentiques et crédibles.
6. Les opposants n’acceptent pas
le témoignage
Le thème du témoignage dans les deux péricopes
5,30-34 et 8,13-19 est placé dans le contexte de débat entre Jésus et ses
opposants (les Juifs et les Pharisiens). La péricope 5,30-40 est une partie du
discours de Jésus adressé aux Juifs (5,19-47). Ces derniers sont en train de
chercher à tuer Jésus (5,18). En effet, après la guérison d’un infirme depuis
trente-huit ans au piscine de Bethzatha le jour du sabbat (5,1-9), le narrateur relate le comportement des Juifs envers Jésus en 5,18: “Ainsi
les Juifs n’en cherchaient que davantage à le tuer, puisque, non content de
violer le sabbat, il appelait encore Dieu son propre Père, se faisant égal à
Dieu.” La suite de ce verset est un long discours de
Jésus adressé aux Juifs (5,19-47), dans lequel se trouve
la péricope sur les témoignages (5,30-40).
Dans le ch. 8, la section 8,12-59 présente deux
débats: (1) Le débat entre Jésus et les Pharisiens (8,12-30), et (2) Le débat entre
Jésus et les juifs (8,31-59). La controverse de ces débats est de plus en plus
vive et se termine par la tentative de lapider Jésus (8,59). Le narrateur
raconte à la fin du ch. 8: “Ils (les Juifs) ramassèrent alors des
pierres pour les lui (Jésus) jeter; mais Jésus se déroba et sortit du Temple.” La controverse et le conflit s’expliquent pourquoi les opposants de
Jésus n’accueillent pas le témoignage de Jésus en 3,11 et 3,32-33. (Voir
l’analyse au point “II. Le témoignage de Jésus en 3,11.32-33” plus haut). Dans
le contexte de la discussion à propos de la véridicité du témoignage et de son
identité divine, Jésus dévoile la situation de ses adversaires dans les deux péricopes
5,30-40 et 8,13-19, dans lesquelles les opposants (les Juifs et les Pharisiens)
font
preuve d’ignorance de dix réalités suivantes:
(1) NE PAS ENTENDRE la voix du Père (5,37b).
(2) NE PAS VOIR la face du Père (5,37c).
(3) NE PAS AVOIR la parole du Père en eux (5,38a).
(4) NE PAS CROIRE en l’Envoyé du Père (5,38b).
(5) NE PAS VOULOIR venir à Jésus pour avoir la
vie (5,40).
(6) NE PAS SAVOIR d’où Jésus vient (8,14e).
(7) NE PAS SAVOIR où Jésus va (8,14f).
(8) NE PAS SAVOIR où le Père de Jésus est (8,19a).
(9) NE PAS CONNAÎTRE Jésus (8,19b).
(10) NE PAS CONNAÎTRE le Père (8,19c).
Ainsi ceux qui s’opposent à Jésus dans les
péricopes 5,30-40 et 8,13-19 n’entendent pas, ne voient pas, ne gardent pas, ne
croient pas, ne veulent pas, ne savent pas, et ne connaissent pas les richesses
essentielles ci-dessus. Ce n’est donc pas étonnant qu’ils ne reçoivent pas le
témoignage de Jésus et qu’ils cherchent à le faire mourir.
Les dix accusations ci-dessus doivent être
comprises dans le sens positif et pédagogique. C’est-à-dire que Jésus fait
comprendre à ses opposants pourquoi ils n’arrivent pas à comprendre
l’enseignement de Jésus et n’accueillent pas sa révélation sur son identité et
son origine d’en haut. Sous la forme d’accusation, Jésus invite les
interlocuteurs (les Juifs et les Pharisiens) dans le récit, et surtout le narrateur
invite ses lecteurs à reconnaître qui est le Père et qui est Jésus et enfin à recevoir
le témoignage de Jésus, accueillir ses enseignements et croire en lui.
IV. Conclusion
Cet article a analysé les textes sur le thème du
témoignage de Jésus et du Père. Tout d’abord, en 3,11 et 3,32-33, Jésus témoigne
de ce qu’il a vu et entendu auprès de son Père. C’est-à-dire à travers toutes
ses paroles et ses actions, Jésus réalise les œuvres du Père (5,36). Le
témoignage de Jésus n’est pas mentionné dans le passage 5,30-40, parce que selon
la tradition juive, le témoignage de lui-même n’est pas valable (5,31). C’est
pour cela que Jésus cite une serie de témoignages à son sujet: le témoignage de
Jean Baptiste (5,33-35), le témoignage des œuvres de Jésus (5,36), le témoignage
des Écritures (5,39), et en particulier le témoignage du Père en 5,31-32 et
5,37-38.
Dans le passage 8,13-19, Jésus révèle aux
Pharisiens que bien qu’il se rende témoignage à lui-même, son témoignage
est valable, parce qu’il sait d’où il est venu et où il va (cf. 8,13-14). Ainsi en se conformant à la loi selon laquelle le témoignage de deux personnes
est valable, Jésus présente le sien: (1) Jésus lui-même témoigne et son
témoignage est valable (8,14a.18a), et (2) Le Père qui a envoyé Jésus, témoigne
de Jésus (8,18b) et son témoignage est valable (5,32b). Ici ce ne sont pas les
témoignages des hommes mais le témoignage de Dieu et celui du Fils de Dieu, ces
témoignages sont donc authentiques et fiables.
Dans les deux passages sur le thème du témoignage
(5,30-40; 8,13-19), les opposants de Jésus refusent de reconnaître
l’authenticité du témoignage de Jésus et celui du Père. En 3,11.32-33, le
témoignage de Jésus n’est pas reçu par les autorités juives. La raison pour
laquelle ses adversaires n’acceptent pas le témoignage de Jésus est qu’ils n’entendent
pas, ne voient pas et ne savent pas les réalités indispensables (voir les dix “ne pas” ci-dessus).
Les débats et les discussions dans l’Évangile ont
une valeur pédagogique. À travers les accusations, Jésus invite ses opposants à
prendre conscience de leurs lacunes, de ce fait ils peuvent ouvrir leur cœur à
recevoir le don de la vie éternelle que Jésus offre à toute personne qui croit
en lui. Au niveau du récit, c’est le narrateur qui invite les lecteurs à
accueillir le témoignage de Jésus et celui du Père, c’est ainsi que les
lecteurs de tout temps peuvent écouter Jésus et recevoir ses enseignements
comme “la nourriture qui demeure en vie éternelle” (6,27b).
Cet article n’analyse pas encore le thème du
témoignage des Écritures (5,39). En fait la relation entre l’Évangile de Jean
et les Écritures est un vaste sujet, ce thème sera donc exploré dans d’autres articles./.
Source: http://leminhthongtinmunggioan.blogspot.com/2014/07/le-temoignage-de-jesus-et-du-pere-dans.html
Voir
Les articles sur ce thème:
Terminologie:
Không có nhận xét nào:
Đăng nhận xét